Le cauchemar du drame épidémique. Avec 352 991 nouveaux cas de Covid-19 et plus de 2 800 morts en 24h, la situation semble hors de contrôle dans une Inde submergée. Les autorités annoncent un prolongement du confinement à New Delhi et une campagne d’aide humaine et matérielle a été initiée par certains pays à l’instar des Emirats-Arabes-Unies, les Etats Unis et d’autres pays européens. De plus, plusieurs hashtags ont été lancés sur les réseaux sociaux pour sensibiliser et informer.
L’Inde peut-elle surmonter cette épreuve ?
Flambée épidémique
Les chiffres sont alarmants, en seulement une semaine plus de 2 millions de nouveaux cas ont été enregistrés, un pic jamais enregistré dans le monde depuis le début de cette pandémie. Face à cette explosion le système de santé indien est au bord du gouffre : manque de matériels, de lits de réanimation, d’appareils respiratoires, pénurie d’oxygène et surtout un corps médical insuffisant.
Outre ces considérations, l’apparition du variant dit « indien » (B.1.617 de son nom scientifique) semble être le facteur majeur expliquant cette flambée épidémique. Effectivement, cette troisième vague se montre particulièrement menaçante à cause de l’émergence de ce nouveau variant repéré majoritairement dans l’Etat du Maharashtra. Celui-ci est qualifié de « double mutant », plus mortel et contagieux, il est soupçonné de pouvoir résister aux vaccins et « pourrait déjouer les anticorps » explique Rakesh Mishra, directeur du Centre de biologie cellulaire et moléculaire en Inde.
Soins à la rue et crématoriums à ciel ouvert : Soutik Biswas affirme que le pouvoir de “respirer est devenu un luxe” qu’énormément de personnes ne peuvent plus se permettre.
Surchargés, des hôpitaux à New Delhi ne trouvent aucune autre issue que celle de soigner ses malades à la rue compte tenu du manque de place et de l’afflux des patients. Certains témoignages décrivent des couloirs encombrés de lits, des femmes, des hommes et des personnes âgées suppliant en vain qu’on leur fournisse une place ou de l’oxygène.
La difficulté est d’autant plus accrue lorsque même les incinérations ne peuvent se tenir dans de bonnes conditions. En effet, des images choquantes, suscitant à la fois la peur et la compassion, ont été publiées par la BBC. Celles-ci exposent de multiples crématoriums à ciel ouvert au sein de la capitale indienne, New Delhi. Des corps qui brûlent par centaines, sous les regards des familles tristes et peinées, à la fois par leurs pertes mais aussi à cause de l’absence de cette dimension traditionnelle des crémations tant importante à leurs yeux. « Le virus et sa maladie avalent les gens tel un monstre » révèle un travailleur dans un crématorium de Bhopal.
Incinération de masse organisée dans un crématorium de New Delhi, en Inde, 26 avril 2021 (Photo prise par Adnan Abidi).
Des patients oxygénés dans des véhicules attendant d’être pris en charge par les soignants à Ahmedabad. (Photos prises par Ajit Solanki).
Que fait le gouvernement ?
Les éléments précédemment évoqués mettent en exergue non seulement la dangerosité de ce variant mais surtout l’impréparation du gouvernement face à cette troisième vague épidémique. En effet, la vétusté du système de santé indien cause un tourbillon de colère auquel le gouvernement essaie de faire face. Ce dernier a décidé de prolonger d’une semaine le confinement, a annoncé récemment le chef du gouvernement de Delhi Arvind Kejriwal. Il a affirmé par la même occasion que : « Les ravages du coronavirus se poursuivent et il n’y a pas de répit ». Dans l’Etat d’Uttar Pradesh, un confinement a été mis en place le weekend. L’Etat du Maharashtra a quant à lui pris la décision de fermer tous les magasins non essentiels.
Au-delà des mesures prises par ces Etats fédérés, le gouvernement central a mis en place d’autres mesures à l’instar de trains servant à acheminer les réserves d’oxygène vers certaines villes voire les plus touchées d’entre elles.
Réveil de la communauté internationale
Face à la gravité de cette situation, la communauté internationale se devait de réagir, et pour une fois elle a été au rendez-vous et a répondu aux attentes. Ce dimanche, le Président des Etats-Unis s’est exprimé via Twitter et a promis son aide, tout en rappelant le soutien qu’a apporté l’Inde à son pays auparavant, il affirme : « Tout comme l’Inde a envoyé de l’aide aux Etats-Unis lorsque nos hôpitaux étaient sous tension au début de la pandémie, nous sommes déterminés à aider l’Inde en ces temps difficiles ». Plusieurs d’autres pays se sont également engagés à agir face à ce drame, tel est le cas de l’Allemagne, la France, la Russie et même le voisin pakistanais malgré les relations conflictuelles entre les deux gouvernements. Le Premier ministre Imran Khan a en effet exprimé sa solidarité avec le peuple indien en souhaitant un rapide rétablissement aux malades via Twitter. Boris Johnson, Premier ministre britannique s’est à son tour exprimé et a affirmé que « Des équipements médicaux vitaux, dont des centaines de concentrateurs d’oxygène et des respirateurs, sont maintenant en route du Royaume-Uni vers l’Inde ».
D’autres campagnes de sensibilisation et de soutien ont été lancées, comme à Dubaï qui a illuminé son Burj Khalifa du drapeau indien ce dimanche soir avec le hashtag #StayStrongIndia, signe de solidarité des Emirats-Arabes-Unis. Ces derniers ont notamment décidé de livrer par avion des conteneurs d’oxygène en guise d’aide matérielle.
Appels à l’aide sur les réseaux sociaux
Tous les moyens de mobilisation sont bons. Les appels à l’aide se multiplient ainsi sur les réseaux sociaux, notamment avec les hashtags #StayStrongIndia ou #IndiaNeedsOxygen. Des stars du cinéma indien telles Priyanka Chopra Jonas, Sonam Kapoor Ahuja, Sushmita Sen ou encore Sidharth Malhotra relatent les informations et les campagnes de sensibilisations. Pendant ce temps, d’autres n’hésitent aucunement à partager leurs photos aux Maldives n’apportant aucun intérêt ou sensibilité à la situation. L’acteur Nawazuddin Siddiqui est intervenu, critiquant les célébrités qui partageaient ces photos de vacances, dans une interview accordée à Bollywood Hungama, il les a appelés à « avoir honte » de leur comportement.
Cependant, les réseaux sociaux sont loin d’être protégés de l’emprise du gouvernement indien. Ce dernier a en effet intenté une requête visant à supprimer des tweets qui critiquaient la gestion de cette crise. Le réseau social américain, Twitter, a confirmé avoir supprimé certains tweets et a donc cédé à la pression des autorités indiennes. Le gouvernement devrait plutôt se concentrer sur la gestion de crise que de se soucier de sa réputation, qui, bien malgré elle a été frappé par son inaction justifiant toutes les critiques.