Violée, poignardée et brûlée vive, voici l’histoire sordide de Shaïna Hansye, victime d’un engrenage d’acharnement et d’une injustice sans précédent.
Le calvaire vécu par la jeune fille
Le calvaire de Shaîna débute en 2017. Alors âgée de 13 ans, un engrenage d’acharnement s’établit autour d’elle sans qu’elle ne puisse avoir une défense digne de ce nom.
Tout a commencé lorsque son petit ami prend une photo d’elle dénudée, dont il se sert pour la faire chanter à plusieurs reprises. Un jour, et sous la menace de la diffusion de cette photo, elle le rejoindra dans une clinique désaffectée. C’est ici qu’elle sera victime d’un viol collectif filmé en août 2017. Par la suite, les images de cet acte inhumain sont diffusées sur les réseaux sociaux. Selon son frère, ces images lui ont valu une réputation de «fille facile» voire de «prostituée» dans son quartier.
Des réponses judiciaires inefficaces
Dans une tourmente, elle devient la risée du quartier. Shaïna trouve tout de même la force de porter plainte contre son petit ami. Ce dernier est accusé d’avoir commis ce viol et est mis en examen mais relâché peu de temps après. Suite à cette mise en examen, le jeune homme a fait l’objet d’un contrôle judiciaire avec placement pendant un mois dans un centre éducatif.
Cependant, au bout d’un mois, le juge d’instruction ne renouvelle pas le placement. Sa décision allait ainsi à l’encontre de l’avis du parquet.
Shaïna quant à elle, se trouve dans l’obligation de changer de collège afin d’échapper à ses harceleurs et à la réputation qui l’a poursuivie malgré elle.
Deux ans plus tard le drame survient
Le 1er octobre 2019, Shaïna portera plainte une deuxième fois contre un jeune homme âgé de 17 ans. Il serait son ex-compagnon. Il est ensuite accusé d’avoir organisé un guet-apens dans lequel Shaïna est tombée le 27 octobre 2019. Après plusieurs coups de couteaux dans le ventre, elle sera brûlée vive. Son corps est découvert par la police dans un cabanon de la cité du plateau Rouher à Creil.
Le mobile présumé de cet assassinat : Shaïna était enceinte. Un assassinat pour lequel sera bientôt jugé son ex-compagnon devant la Cour d’Assises.
Selon son frère Yasin Hansye, Shaïna «n’a pas bénéficié d’une grande considération de la part de la police et de la justice». «C’est comme s’il avait fallu qu’elle soit pleine de sang en train de hurler» pour être prise au sérieux.
Un crime correctionnalisé
Pour ses parents et son frère, la douleur est indicible, la justice n’a pas été rendue, elle a été injuste. Cette même justice qui a échoué dans sa mission de protection de la victime, a encore une fois échoué dans sa mission de punition des agresseurs.
Les trois jeunes, poursuivis initialement pour “viol”, ont ainsi été jugés ce mardi 1er février. Le parquet a requis entre neuf mois et un an de prison ferme pour “violences et agression sexuelle”. Ce viol collectif a donc été correctionnalisé, autrement dit il a été requalifié.
C’est pourquoi la question de la correctionnalisation ou déqualification de certains crimes de viol en délit (agression sexuelle) se pose ici plus que jamais. La loi peut être perçue comme étant mal faite à cet égard. Elle prévoit que le viol est un crime par définition, mais il n’est pas jugé ainsi. Cette pratique de correctionnalisation des viols, aussi ambiguë soit-elle, représente un taux de 60 à 80 % des cas. Elle nous mène ainsi à se questionner sur la conception sociétale du viol, les dispositions mises en place pour lutter contre, mais aussi la position des juges face à un tel crime.
Enfin, le tribunal correctionnel de Senlis rendra sa décision le 1er mars.