L’ombre du cyber-harcèlement : l’impact du streamer Balti sur la communauté sud-asiatique

Racisme banalisé, Balti, pétition

L’intelligence artificielle, un outil puissant, est souvent utilisée à des fins bienveillantes, mais parfois, elle devient le bras armé de l’ignorance et de la haine. C’est précisément ce que le steamer notoire, connu sous le nom de Balti, a accompli avec une cruauté insensée en combinant l’IA et les réseaux sociaux pour répandre un contenu outrageux qui a pris une très grande ampleur.

Les faits

Cet épisode a débuté lorsque le Premier Ministre indien, Modi, a exprimé son soutien à Israël dans le contexte des récents événements avec le Hamas. Plutôt que de favoriser un dialogue constructif, cela a déclenché une avalanche de partages de contenus racistes et blessants, le tout camouflé sous un manteau d’humour de mauvais goût. Balti a joué un rôle central dans cette vague de haine en partageant une image générée par l’IA ce qui a eu pour conséquence une multitude d’insultes et des commentaires humiliants sur Twitter et même en direct sur la plateforme Kick.

L’image partagée par ce dernier fait référence à une pratique d’un village indien lors de la traditionnelle fête de « Gorehabba » qui se déroule quelques jours après « Diwali » . Il ne paraît aucunement inutile de préciser que c’est une pratique qui concerne un seul village ce qui n’en fait aucunement une pratique nationale comme le prétendent ces images. Des combats de lancés de nains ont auparavant été organisés en France mais cela n’a nullement été présenté comme étant la pratique nationale de ce pays ou même les combats de coq encore pratiqués aujourd’hui. 

Capture d’écran d’un des tweets postés par le streamer Balti.

Il est important de souligner que les publications du streamer visent à exprimer son mécontentement vis à vis de la politique menée par le Premier Ministre indien et le soutien de l’Inde à Israël dans le contexte actuel. Cependant, d’autres pays ont également manifesté un soutien ferme sans devenir la cible de propos racistes. Si cette cause lui tient réellement à cœur, ne devrait-il pas commencer par son propre pays d’origine, qui non seulement n’a pas condamné les actions d’Israël jusqu’à présent, mais a récemment signé des accords de normalisation avec ce dernier. Est-ce une justification valable pour tenir des propos injurieux envers tout son peuple comme a été le cas pour les indiens ?

Chaque occasion est bonne pour déverser sa haine. Il est manifeste que des individus saisissent chaque occasion pour véhiculer des préjugés à l’encontre des pays d’Asie du Sud. Les événements rares, isolés ou parfois présents dans nos propres pays sont amplifiés à l’échelle nationale, présentés comme la seule et unique facette de ces nations engendrant des discours racistes et injurieux. Charité bien ordonnée commence par soi-même.

Que dit la loi?

N’ayant aucunement pour objectif de porter un discours victimaire, il est tout de même essentielle de souligner que cette avalanche de haine engendrée par cette image n’est nullement sans conséquence au regard du droit français. 

En effet, il n’est pas nécessaire d’être juriste ou avocat pour constater que ces agissements constituent des infractions définies par le code pénal. Les insultes et le harcèlement circulant sur les réseaux sociaux sont loin d’être anodins. Ils ont des conséquences graves, parfois conduisant les victimes à envisager des gestes désespérés comme le suicide d’où l’importance des précisons qui suivront.

D’abord, s’agissant des injures, le droit français est clair. D’après l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, cette infraction est constituée par toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait. Lorsque celle-ci est publique, elle est un délit passible de 12 000 euros d’amende. Internet étant assimilé à un espace public, l’injure en ligne constitue elle aussi une injure publique.

Enfin, cette dernière est qualifiée d’injure raciste lorsqu’elle vise une personne à raison de sa « race » ou de ses origines ethniques. L’injure raciste est punie par la loi depuis 1972 et sa répression s’est approfondie depuis la loi Gayssot de 1990. Leurs auteurs peuvent être poursuivis devant les tribunaux pour « propos à caractère raciste ». Dans le cas de ces poursuites, les associations antiracistes peuvent se constituer partie civile (à condition d’avoir au moins 5 années d’existence). En ce sens, si cette injure a un caractère raciste, alors, la peine encourue s’alourdit et peut aller jusqu’à 22 500 € d’amende et 6 mois de prison.

Ensuite, s’agissant du harcèlement engendrée par cette vague de haine :

On définit le harcèlement comme étant des violences physiques et/ou psychologiques répétées et exercées par une ou plusieurs personnes. En d’autres termes, c’est lorsque le comportement des autres à son égard devient persécutant ou mal vécu. Ainsi, c’est la fréquence des propos et leur teneur insultante, obscène ou menaçante qui constitue le harcèlement.

Avant la loi du 4 août 2014, le code pénal sanctionnait les faits de harcèlement moral uniquement dans le cadre du travail ou au sein du couple. Avec  le nouvel article 222-33-2-2 du code pénal, tout fait de harcèlement est punissable d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Sous sa forme numérique, plus communément appelé le Cyber-harcèlement, les propos en cause peuvent être des commentaires d’internautes, des vidéos, des montages d’images, des messages sur des forums etc…

Que faire?

Face à une telle débauche de haine et de discrimination, une pétition a été lancée en vue de porter plainte contre ce dernier. Vous pouvez y avoir accès en cliquant ici.  

Ce combat n’est pas seulement le leur, il est devenu le nôtre, car il révèle un climat inquiétant qui se dessine autour de la communauté sud-asiatique en France. Le racisme, sous des formes variées, se normalise, se manifestant par des moqueries, des stéréotypes, des étiquettes et un langage inacceptable. Cette communauté, souvent silencieuse, se lève aujourd’hui pour briser ce silence et dénoncer vigoureusement ces comportements, conformément à la législation française qui les condamne sans ambiguïté.

L’humour, souvent une forme de sagesse, perd sa noblesse lorsqu’il est dévoyé à de telles fins. Notre liberté s’arrête là où commence celle des autres, un principe fondamental qui, malheureusement, est parfois négligé. Les limites sont essentielles et doivent être respectées.

En fin de compte, il paraît essentiel de souligner que ce n’est pas un combat d’une communauté contre une autre, c’est un combat pour la dignité et le respect, un combat que chacun d’entre nous, pourvu de bon sens, devrait embrasser. C’est un combat pour une société inclusive, fraternelle, où le racisme sous toutes ses formes est combattu avec détermination. C’est un combat pour l’unité et la coexistence harmonieuse. C’est le nôtre. 

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